Terrorisme

Lutte contre le terrorisme : Ces drones made in Burkina Faso.

L’Agence d’innovation de défense et de sécurité (AIDS) est l’œuvre de Naana Technology, une entreprise portée par une dizaine d’ingénieurs burkinabè basés au pays et à l’étranger, spécialisée dans la fabrication de drones made in Burkina et la maintenance avancée de toute marque de drones. Elle compte désormais travailler en collaboration avec les FDS (Forces de défense et de sécurité) pour bouter le terrorisme hors du Burkina Faso. Nous avons pu nous imprégner de son approche qui est de bâtir un pôle autonome et stratégique de solutions opérationnelles endogènes afin de mettre fin à la guerre dans laquelle le pays est plongé.

Pour nombre de personnes, la lutte contre l’hydre terroriste ne doit pas incomber aux FDS uniquement. Et Naana Technology, cette entreprise pilotée par de jeunes Burkinabè, l’a compris.

La création de l’Agence d’innovation de défense et de sécurité (AIDS) par cette entreprise en témoigne. Car cette Agence vise une autonomie stratégique afin d’être un guichet unique de proposition de solutions opérationnelles endogènes au service de la sécurité et de la défense. Ce, avec pour ambition de fédérer, de structurer et d’accélérer l’innovation en matière de défense.

L’AIDS dispose de trois pôles stratégiques. Un centre d’assemblage et d’ingénierie drone, un laboratoire d’investigation numérique qui est une première au pays des Hommes intègres et à travers lequel la structure compte soutenir l’action des forces de défense et de sécurité sur le terrain.

L’Agence comporte enfin une salle de commandes et de contrôle dotée de technologie satellitaire. C’est sur une superficie d’environ 1000 m² où trône un bâtiment de type R+1, loin des projeteurs, dans la capitale burkinabè, que se trouve le siège de l’AIDS.

Un grand apport à l’action des militaires

Lionel Nikiéma, ingénieur en génie des systèmes électriques et énergies renouvelables à Naana Technology, explique qu’il était plus qu’important pour le Burkina Faso de disposer d’une unité de production de drones, vu le contexte actuel du pays. Et de soutenir que le drone est un outil stratégique dans cette guerre menée par le Burkina Faso. Cette unité, selon lui, sera d’un grand apport à l’action des militaires sur le théâtre des opérations. 

« Grâce à notre unité de production de drones, nous offrons à nos unités (FDS, ndlr), une flexibilité dans les opérations. Ça veut dire que d’une zone A à une zone B, les réalités peuvent être différentes et nécessiter des équipements différents. Avec cette unité de production et de conception (de drones, ndlr), nous offrons la flexibilité et l’élargissement des zones d’intervention grâce aux drones que nous avons », argumente-t-il.

Outre l’assemblage des drones, Lionel Nikiéma dit qu’ils font également de la maintenance avancée. A l’écouter, ce volet concerne non seulement la réparation des drones, mais aussi l’analyse systématique du comportement affiché par un drone lors d’une opération donnée.

« La maintenance est faite suivant le diagnostic (…). Ici, nous allons tester chaque élément du drone. Que ce soit des drones commerciaux ou les drones que nous concevons, nous les démontons entièrement et nous testons les éléments un à un pour identifier le problème », renseigne-t-il

Lionel Nikiéma ajoute que dès que la panne est détectée, la phase suivante est la réparation de l’appareil. Pendant celle-ci, explique le jeune ingénieur, ils procèdent à des soudures ou d’autres réparations en fonction du diagnostic.

Il renchérit que l’AIDS constitue une solution en matière de maintenance des drones utilisés par les forces de défense et de sécurité. « La maintenance est cruciale  parce que nous avons constaté qu’il y a un cimetière de drones (…)», fait-il remarquer.

Des drones kamikazes

L’AIDS conçoit déjà des drones made in Burkina. Dernièrement, elle a réussi à assembler un drone de reconnaissance qu’elle a baptisé « Konomba ». « C’est un drone ayant une portée de 30 kilomètres. Nous l’avons testé sur 15 kilomètres (…). L’appareil a une autonomie de 40 minutes et a été conçu ici (au Burkina, ndlr) », précise Lionel Nikiéma.

Les ingénieurs de l’AIDS viennent aussi de mettre au point un drone tactique capable de bombarder les sites ennemis. « Ce n’est pas de la théorie. Ce sont des appareils que nous concevons et qui sont prêts à être utilisés. Nous avons même un projet de développement de drones kamikazes », confie-t-il.

De son côté, Konomba Traoré nous avoue qu’il a été honoré d’apprendre que l’AIDS a donné son nom à l’un de ses drones. Il ajoute que les promoteurs lui ont fait savoir que c’était une façon de lui rendre hommage pour son combat en faveur de la valorisation de la culture burkinabè en particulier et de la culture africaine en général.

Konomba Traoré salue la mise en place de cette agence et affirme que la technologie est très importante dans la guerre contre le terrorisme et que le Burkina en a grandement besoin.

…« Konomba », signifie « aigle royal »

De l’avis de ce professeur de musique, les promoteurs de l’AIDS ont vu juste en baptisant l’un de leurs drones « Konomba ». En effet, dit-il, le drone est un engin volant et lui son nom, « Konomba », signifie « aigle royal ». 

https://youtube.com/watch?v=LvB1vJmqeH0%3Ffeature%3Doembed

« Ils n’ont pas eu tort de le faire. Mon nom, Konomba, signifie ‘’grand oiseau’’, c’est-à-dire l’aigle royal, qui est l’oiseau rapace le plus fort. Et l’aigle se caractérise par sa force, sa vitesse, sa précision et sa vigilance. Ce sont ces qualités-là justement qu’il faut à un drone », soutient-il.

Se prononçant sur le retrait de l’armée française au Burkina, cet administrateur civil à la retraite rend hommage au premier président du Burkina, Maurice Yaméogo, qui avait, à son temps, refusé l’installation d’une base militaire française au Burkina Faso, Haute-Volta à l’époque.

« Il faut applaudir Maurice Yaméogo pour ça », appuie-t-il. Par ailleurs, il déplore que, malgré la présence des militaires français, la situation n’a fait que se dégrader.

https://youtube.com/watch?v=hH8MO9EQT9Q%3Ffeature%3Doembed

« On a constaté que cette base militaire-là était amorphe. C’est le silence, bouche cousue, mains cousues, tout cousu. Si bien qu’on s’est demandé si ces militaires étaient là pour la défense de notre pays. D’aucuns même se sont demandé s’ils (ces militaires français) n’aidaient pas plutôt les terroristes à nous combattre », dénonce-t-il.

La solution au terrorisme n’est pas seulement militaire ni financière

Par ailleurs, Konomba Traoré affirme que la solution contre le terrorisme ne doit pas être seulement d’ordre militaire. « J’ai toujours dit que la solution au terrorisme n’est pas seulement militaire ni financière. Elle est surtout mystique. Notre culture regorge de potentialités pour vaincre le terrorisme. Il suffit de s’organiser. 

Chaque village doit revenir en arrière pour faire des offrandes à ses lieux de culte. Mais c’est dommage car ces lieux de culte aujourd’hui sont détruits, délaissés », complète-t-il.

https://youtube.com/watch?v=gQzUO-bW0u0%3Ffeature%3Doembed

Ingénieur de conception en génie des systèmes électriques, Kader Ilboudo, à peine trente ans, est le directeur général de l’AIDS. Il nous informe que la mise en place de l’AIDS est le fruit d’un engagement intense et de l’enthousiasme de tous ceux qui croient que l’avenir ne se construit qu’en se réinventant.

Il interpelle les Burkinabè sur la nécessité d’investir dans des domaines stratégiques comme la sécurité et la défense pour, dit-il, garantir la souveraineté du pays et l’excellence de sa recherche.

Une urgente nécessité

« Aujourd’hui, cet investissement est une urgente nécessité. Regardez le monde autour de nous ! Nos systèmes d’informations regorgent de données que chacun, allié comme adversaire, voudrait détenir.

Les conflits d’aujourd’hui ne ressemblent en rien à ceux d’hier. Voyez le conflit Ukraine/Russie ! Les théâtres d’opération changent. Le terrorisme nous frappe, ses modes d’action se réinventent, et ce ne sont pas des guerres conventionnelles que nos forces mènent », souligne-t-il.

Kader Ilboudo assure que la technologie de pointe n’est plus l’apanage de quelques puissances comme autrefois. Il atteste que celle-ci se répand si vite qu’elle devient accessible à tous, même aux forces obscurantistes.

« Dans ce contexte, que devons-nous faire ? Attendre d’être dépassés par nos ennemis ? Faire le choix de l’affaiblissement et de la dépendance ? Non ! Ce n’est pas l’état d’esprit de notre défense, ce n’est pas l’état d’esprit de nos entreprises, ni de nos ingénieurs encore moins de nos chercheurs », martèle-t-il.

L’AIDS, selon son manager, travaille en collaboration avec le Centre de recherche et de développement en robotique et technologies des Forces armées du Ghana. Les deux centres, révèle-t-il, sont en train de développer des projets d’intérêt commun pour leurs deux pays.

Présent à la cérémonie d’inauguration de l’AIDS, le directeur du Centre de recherche et de développement en robotique et technologies des Forces armées du Ghana s’est réjoui que Kader Ilboudo et son équipe aient si vite amélioré ce qu’ils ont appris au Ghana pour l’adapter aux besoins du Burkina.

« Je suis très impressionné par les avancées qu’ils ont faites. Nous sommes en train de concevoir au Ghana un logiciel pour contrer le terrorisme. Quand il sera développé, nous envisagerons une convention avec l’AIDS pour que le Burkina puisse profiter aussi de ce logiciel », promet-il.

Le lieutenant-colonel Evrard Somda, chef d’état-major de la Gendarmerie nationale, admet que la mise en place de l’AIDS est une fois de plus la preuve que la jeunesse burkinabè n’est pas restée en marge de sa « responsabilité historique » qui est de contribuer à la reconquête du territoire national.

« De nos jours, au cœur de la capacité militaire, doivent se trouver la science, la technologie et l’innovation. L’inauguration de l’AIDS répond donc à la nécessité d’inclure désormais dans tous nos projets importants, le réflexe de recherche et de développement sous-tendu par une industrie locale forte et spécialisée », affirme l’officier supérieur de gendarmerie.

Un esprit de complémentarité et de solidarité

À l’entendre, la technologie est une nécessaire révolution dans la conduite de la guerre moderne et commande l’implication d’ingénieurs, de chercheurs et d’innovateurs qui mettront leur génie créateur au service de la sécurité de la mère patrie.

Il assure que l’initiative de Naana technology offrira aux Forces de défense et de sécurité un avantage technologique dans l’usage des drones, de l’intelligence artificielle, dans la cybersécurité et l’investigation numérique.

« Ce n’est que dans une synergie d’actions, dans un esprit de complémentarité et de solidarité comme nous le démontre la diversité de nos origines, de nos positions et rangs respectifs que nous arriverons à relever le défi de la sécurisation de notre pays », dit-il.

En rappel, l’Agence d’innovation de défense et de sécurité (AIDS) a été inaugurée le 22 décembre 2022 par le lieutenant-colonel Evrard Somda, chef d’état-major de la gendarmerie nationale. Il faut noter que l’État burkinabè a aussi contribué à la mise en place de cette agence à travers le Fonds burkinabè du développement économique et social. L’AIDS souhaite nouer des partenariats solides avec le ministère de la Défense et celui de la Sécurité afin de mieux accompagner l’action des FDS sur le théâtre des opérations.

Willy SAGBE

Salut! 👋
Ravi de vous retrouver.

Inscrivez-vous pour recevoir instantanément l'actualité national et international dans votre boîte de réception.

Nous ne spammons pas ! Consultez notre politique de confidentialité pour plus d’informations.

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page